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Le blog de Pierre Montmory

L'HOMME QUI CRIE

L'HOMME QUI CRIE

     Autrefois, lorsque nous organisions un festival, nous prenions : tout le monde. Un festival populaire !

     Nous invitions les personnes qui avaient du soleil au cœur et qui voulaient offrir leurs trouvailles.

     Nous étions des amateurs. Amateur : celui qui aime, celui qui garde le bon goût.

     Il n’y avait donc aucune sélection, aucune compétition. Nous étions réunis pour donner le meilleur de nous-mêmes dans des rencontres passionnées. Nous ignorions alors les chefs, les agents, les formulaires, les autorisations et c’était gratuit pour les artistes et le public.

     J’ai ainsi participé à de nombreux festivals entre 1970 et 1980. J’y venais avec ma troupe de théâtre et je prenais bien souvent en main la régie technique. Nous faisions tout avec l’amitié. Les autorités nous laissaient faire, sans doute par dépit, car il n’y avait alors rien dans les villes où l’ennui habitait. Quelques gens fortunés nous servaient de mécènes, nous prêtaient des lieux. Des écoles nous prêtaient leurs locaux pendant les congés scolaires.

     Nous étions de milieux très différents mais ici la différence était l’amitié.

     Moi, enfant de la balle, je jouais en scène depuis 1964, acteur, musicien, pantomime, peintre… à l’âge de 16 ans j’étais régisseur général. J’ai offert mon travail à des fêtes du théâtre comme : Les Rencontres Théâtrales de Sèvres (12 ans d’existence); le festival annuel de la Fédération Nationale du Théâtre Universitaire (dont est issu le fameux festival de Nancy créé par Jack Lang et les artistes qui désiraient faire carrière); le premier festival de Libre Expression à Metz (ville austère entourée de casernes); le festival de La Baule (sur la plage en face du casino !) et chaque année, au festival d’Avignon, comme j’étais grouillot au palais des papes, homme à tout faire, et dans les pantalons et les robes des créateurs d’alors, j’avais un peu de temps et les moyens d’aider les copains et, avec trois bouts de bois et de la ficelle, nous fabriquions des merveilles dans le festival off.

     C’est alors que François Mitterrand a été élu et Jack Lang nommé ministre de la culture. La première année les caisses étaient encore vides. La deuxième année les premières subventions ont servi à éponger les dettes, de qui ? Puis l’on s’est mis à construire ce que l’Action Culturelle des travailleurs avait rêvé : des centres dramatiques, des maisons de la culture… Et alors une nouvelle sorte d’humains fut créée : les agents culturels supervisés par des commissaires à la culture !

     Et ce fut le début de la fin.

 

     La paix fut brisée par la confiscation des outils que nous avons créés. La compétition, la performance et la ruse achevèrent de transformer nos fêtes en des marchés, nos chansons en produits, notre art de vivre en industrie, la culture humaine en charpie.

     La paix fut une mendiante aux coins des rues. J’ai pleuré sans larme comme un oiseau sans plumes. Puis j’ai repris mes chemins, seul, en ma compagnie. J’ai vogué par bonds sur des vagues. De places en places, d’un seuil à l’autre, j’ai porté parole, les gens m’avaient donné un nom : L’HOMME QUI CRIE.

 

 

Pierre Marcel Montmory trouveur

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P
Mon ami Mhamed Hassani m'a dit : <br /> "Infatigable, mon ami tu vas sur les chemins de pierres, portant ton destin comme une offrande à l'humanité, avec ton sourire toujours avenant, ton regard source d'horizon et la main tendue aux retardataires. Et de temps en temps nous nous croisons au rond-point de nos amours qui dialoguent et farandolent faisant voler en éclats les frontières et les cloisons".
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