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Le blog de Pierre Montmory

LA PUTAIN DE DIEU

LA PUTAIN DE DIEU

OUI

 

Oui !

Oui, je suis ton chien

N'ayant d'aboyance que la mienne

Oui je suis ce loup garou

Défiant la Lune perverse

Pleine de sa chair !

 

Oui, je fais le malin

Trafiquant des combines

Oui je taquine

L’éternelle concubine

Enfilant les Étoiles solaires

Sur ma quenouille en l’air

 

Oui, je suis un monstre

Fatiguant son gibier

Oui je suis bourreau

Allongeant le supplice

Sur l’autel d’Éros

Je fane les roses

 

Oui, je suis ton dieu

Pour t’éprouver sans doute

Oui, je suis cette idole incarnée

De terre et d’eau qui désire

Soumis à tes caprices

À la caresse de ta peau

 

Oui, je suis ton maître

Exigeant et sans faiblesse

Oui, une laisse d’écume

Autour de tes reins

Prisonnier je m’évade

Des murs de ton sein

 

Oui, je suis ton esclave

Négligeant mes chaînes

Oui, je suis infidèle

Comme la vie après la mort

Je suis ton remord

Et ton âme comblée

 

Sabrina Barbès

LA PUTAIN DE DIEU

LA PUTAIN DE DIEU

(Indulgence)

     Poupée de cire molle au masque triste. Sa bouche carnée aux dents noires, elle sourit. Sur le fond bleu de ses yeux, coulent les traits de la nuit.

      Des mains croisées qui font fléchir les ans. La bourse nouée autour du poignet, elle défait sa     chevelure. Et chaque jour recommence sa triste romance.

     À  guichets fermés les soirs d’abondance, loin des lieux saints, mais aux lieux d’aisance, où le bourgeois propret et vulgaire déballe sa bourse sur un comptoir.

     La putain de Dieu officie dans le club des déportés de l’enfance. La rose entre les dents elle a figuré pour la science entre deux potences.

     Tous les mots vont pour elle. Mais aucune nuit ne lui ressemble. A la putain de Dieu, quoi ; des nuits et des nuits à marcher – comme s’il ne pouvait jamais faire jour.

     Le bord de sa lèvre supérieure frissonne et elle a un léger rictus nerveux qui lui fend la joue. Elle regarde les néons coloriés dans la brume blafarde. Une ombre épaisse de sueur, avec une haleine chaude d’alcool et de tabac, stationne devant elle.

     Soldate au garde à vous, poupée de plastique dur, lisse et polie. Peinte au vernis. Ses faux cheveux blonds tirés en arrière pour dégager son front hautain et stupide. Elle affiche le prix de sa liberté.

     Le client morose renâcle en grimpant derrière sa croupe jusqu’à une balustrade, d’où, autrefois, on jeta un exilé par une fenêtre.

     Elle craint la lumière et ferme le rideau. Elle cache la vue plongeante sur son secret que le chaland pourrait voir en passant devant la vitrine de la boutique.

     La rose de nuit, fleur de nenni, garde la pose au champ d’honneur ; pour la bonne cause ou le malheur. Et Dieu lui tient sa main pour lui souffler un baiser.

     Dans le miroir son visage se ranime et le rouge de son sang sur le blanc de ses joues. Son sourire efface les tirades de la nuit.

     Le jour seul voit ses rides pendant son sommeil. Sur le lit d’un hôtel, elle ferme les yeux.

 

Sabrina Barbès

LA PUTAIN DE DIEU
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