31 Janvier 2019
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- ARTICLES CHRONIQUES -
SORTIR DE SOI
Perdus pour avoir quitté la maison de dieu le père patron et de la mère tisseuse de drapeau. Chacun tourne en rond dans son petit chez soi et ressasse les mêmes reliques de vérités surannées. Les seuls mais pas rares qui trouvent la vie créatrice de rêves sont celles et ceux qui sortent du soi. Sortir de soi c'est ouvrir grand la porte à la curiosité et se prédisposer au don. Les vraies richesses sont dans les cœurs candides qui se contentent d'aimer pour aimer, de chanter pour chanter. Et plus nous recevons plus nous nous offrons nous-mêmes sans compter sur le temps mécanique, nous devenons éternels en vivant avec tous les humains, ces autres qui nous confirment que la muse jamais ne dort, l’amour jamais mort.
Alors, au travail, et que chacun renaisse chaque matin. Que chacun sorte de chez soi et s’invente un nom pour la journée nouvelle; que chacun trouve ses verbes sans façon, de ses gestes à la bouche, que les voix chantent les caractères. Nul besoin d’un bréviaire ou d’une feuille de route, la voie lactée est là qui nous tend ses seins généreux. Alors buvons cette manne intangible, rions à la face du firmament tandis que nos pieds chevauchent le ventre fécond de notre Terre, le seul plus beau pays, ce pays de bohémiens en exil dans l’Univers. Et rappelons-nous le travail, toujours le travail, sans lequel la liberté s’ennuie, l’amour est déçu, la beauté se désole. Laissons les monuments à la mécanique du temps, abandonnons les drapeaux à la rouille des armées. Sur les ruines de l’orgueil, sous les signes de la vanité, dans le langage de la violence, dans le silence des soumissions, il n’y a que le néant pour nous précipiter dans son abîme systémique.
Au travail, les artistes ! La rue meurt de vos silences ! Que les pouvoirs gardent les ruines et que poussent les ronces dévorantes ! Au travail ! On part à pieds avec le vent dans les mains. Pétris de certitude que l'éternité est là, et que sa rumeur sous nos pas s'enfonce dans le sable. Nulle trace que ce verbe qui ne meurt jamais que si l'on lui laisse le pouvoir de se taire.
Avec qui peut-on apprendre ce qui est au coeur de la démocratie ?
L’espace public est devenu un castelet de marionnettes communicantes
Dans notre démocratie, le problème fondamental est la dégradation de l'usage de la parole publique. Les hommes et femmes publics sont des marionnettes à qui on ne peut plus faire confiance.
Je voudrais désigner ici ce qui me semble l'un des problèmes les plus fondamentaux qui minent notre démocratie moderne, non pas seulement dans ses rouages et ses institutions, mais dans sa pratique censée être la plus essentielle : la parole publique.
On voit trop d'hommes (et de femmes) politiques, trop de cadres supérieurs dans les entreprises et dans les ministères, trop de dirigeants et de dignitaires, qui ont si bien appris à manier la litote et l'euphémisme pour exprimer leur point de vue, que leur parole se transforme en rhétorique, au mieux creuse, au pire fielleuse et mensongère.
On ne sait plus si ces locuteurs publics sont excessivement soucieux de la "complexité", ou s'ils cherchent la petite bête, ou, plus médiocrement, à noyer le poisson, à dissimuler des petites trahisons, des petits calculs mesquins, des tricheries quotidiennes...
Il est grand temps que ceux qui prétendent diriger les affaires de ce monde mettent au rencard les "éléments de langage" du bon manager et les bonnes convenances des gens bien élevés - et dociles - qu'ils ont appris à être.
Cette langue qu'on leur a apprise depuis des décennies est une langue de laquais. Cette langue de la communication qu'ils pratiquent non seulement en public, mais entre pairs, et même en famille, c'est une langue de marionnettes. Et ces marionnettes, pour paraphraser le poète Maurice Maeterlinck, "ont les apparences de la vie sans avoir la vie".
Une façon de parler où la rhétorique évacue toute possibilité de délibérer.
Voyez les gestes de leurs mains qui accompagnent leur chapelet ridicule de mots vides! Pures marionnettes, qui en dit plus long sur l'imbécillité ravageuse de cette caste bourgeoise habituée à fermer les yeux sur ce qui heurte ses petites oreilles !
Face à des problèmes humains et politiques particulièrement lourds, on adopte une "positive attitude" en cherchant à tout prix des "bons aspects" là où il n'y en a vraiment pas, et, comble de l'euphémisme, on nie purement et simplement ces problèmes en les qualifiant de "moins bons aspects" - tout en qualifiant la réalité (ô combien gênante) de "caricature" !
Si les droits fondamentaux sont caricaturaux, à ce moment-là il y a un problème !
Un problème qui explique la chute libre de la confiance du peuple envers ses "représentants".
La parole publique est acte. Ce qui est regrettable, c'est que ce soit devenu aussi rare...
Honte aux hommes politiques qui ridiculisent leur fonction d'élu du peuple. Ce genre de personnage a appris toute sa vie à parler de cette façon, et ne se rend même plus compte à quel point il devient lui-même une caricature, une marionnette indigne de siéger et qui - et c'est le plus grave - fait perdre la confiance en la démocratie chez des millions de gens.
Mais qui sommes-nous pour prétendre juger, avec condescendance et mépris, l'expression d'une juste colère ?
Je dirais donc que ma sympathie va plutôt du côté de ceux qui n'ont pas forcément appris l'usage châtié de la langue, que du côté d'une caste qui se pare de ses diplômes et de son "capital humain" pour mieux trahir la langue, à laquelle un pays comme le nôtre doit tant. Car cette trahison est aussi celle de la démocratie (et, soit dit en passant, le recours à la violence institutionnelle et policière est la plus basse illustration de cette trahison d'une classe aux abois, paniquée à l'idée de perdre ses privilèges).
A ce dernier degré de la "société du spectacle" auquel nous sommes arrivés aujourd'hui, est-il encore possible de sortir du clivage inquiétant qui oppose, d'un côté, le parler-marionnette de l'espace public, et, d'un autre côté, le parler-tintamarre des réseaux sociaux ?
Avec qui peut-on apprendre ce qui est au coeur de la démocratie : l'usage sensible et raisonné de la parole, du langage ?
Les gilets jaunes expérimentent la démocratie directe de l’assemblée populaire et citoyenne : un municipalisme libertaire.
La nuit vient tout juste de tomber, et l’assemblée générale commence. Les gilets jaunes sont massés autour de la cabane de la solidarité sur la place de la mairie.
L’ordre du jour va être examiné, rythmé par des votes successifs.
Les trois principaux ronds-points donnant accès à la ville ont été bloqués et puis des centaines de personnes ont continué. Et ça ne s’arrêtera plus !
Appel à venir donner ses revendications :
Le pouvoir au peuple, pour le peuple et par le peuple.
Nous ne voulons pas de représentants qui finiraient forcément par parler à notre place ! Nous construisons un système nouveau où “ceux qui ne sont rien”, comme ils disent avec mépris, reprennent le pouvoir sur tous ceux qui se gavent. Si on nomme des représentants et des porte-parole, ça finira par nous rendre passifs. Reprenons le pouvoir sur nos vies, vive les gilets jaunes dans leur diversité !
Une lutte suivie, soutenue et encourageante : une assemblée des assemblées.
Certains s’autoproclament représentants nationaux ou préparent des listes pour les élections. Notre parole va se perdre dans ce dédale ou être détournée (...) Nous appelons à une grande réunion des comités populaires locaux.
Message bien reçu : la colère des oubliés
On tâtonne, on avance en marchant. On se met en cercle pour que tout le monde puisse parler et entendre. Petit à petit, on apprend et on améliore nos modes de décision.
Le recours systématique au vote pour toutes les décisions.
Et si le vote ne permet pas de dégager une majorité franche, la discussion se poursuit, des éléments nouveaux sont recherchés et la décision est remise à un vote ultérieur.
Ce qu'on découvre, c'est le plaisir de se parler, d'échanger et de se respecter.
On ne peut pas être d'accord sur tout mais l'essentiel c'est notre lutte. Ici, c’est la solidarité, on se rend compte qu'on est moins isolé, qu'on a des problèmes semblables, et puis il y aussi la convivialité, chacun fait attention à ne pas casser le groupe.
« Quand j'ai tout payé, il me reste une patate pour faire le mois »
Gilet jaune à 100 % et seulement gilet jaune ». Cela sonne comme une mise en garde. « Je ne veux pas être récupérée. Ne pas être un parti, c'est cela la force de ce mouvement ».
Des semaines de luttes et de manifestations, où cohabitent les couleurs politiques les plus diverses :
Et alors ? Nous ne sommes pas là pour demander l'étiquette politique de chacun. Les gens ne veulent plus entendre parler de ça. Ce qui nous rassemble est un combat social et démocratique: contre des impôts injustes, des taxes qui frappent les plus fragiles, pour le pouvoir d'achat, pour un changement complet du système politique.
Chacun ici doit laisser ses engagements ou ses appartenances à la porte, sinon c'est l'échec assuré.
Ce qui se passe est radicalement nouveau.
Le peuple a surgi sans prévenir avec de vraies demandes fiscales, sociales, politiques. On ne veut pas se laisser diviser au nom des vieilles forces politiques, des partis. Tout le monde a quelque chose à dire d'intéressant, c'est cela qu'il faut prendre.
Chacun assure ainsi avoir laissé quelques-uns de ses engagements personnels à la maison. Au nom d'une cause supérieure, celle des gilets jaunes et d'un mouvement vécu à la fois comme totalement inédit et venu enfin du peuple
« Une soirée magnifique ! Qu'est-ce qu'on a ri ! »
Ami, entends-tu le vol noir de la finance sur nos paies
Ami, entends-tu la souffrance populaire sans pareille
Ohé, villageois, citadines et banlieusards, c'est l'alarme.
Leur chant a été repris.
Le mouvement et l’écroulement de la politique.
Une mouvance que l’on observe, en Europe et dans le monde, « On est au bord d’une transformation mondiale».
Un contre-pouvoir et surtout pas un parti politique.
Un cadre philosophique aux occupations de places publiques: le concept de « multitude », une nouvelle forme de lutte qui s’appuie sur la fraternité.
En dehors de tout parti ou organisation syndicale.
Un mouvement qui sort des catégories droite/gauche.
Des luttes importantes qui reposent sur une communauté locale.
Le sens de la communauté, la volonté de défendre ce qu’on est. Une économie morale de la foule.
Une ouverture au concept du bonheur : on est heureux d’être ensemble, on n’a pas peur parce qu’on est en germe d’une fraternité et d’une majorité.
Le dépassement du niveau syndical de la lutte. Le problème du coût de la vie reste central, mais le point de vue catégoriel est dépassé. Le mouvement est en recherche d’égalité autour du coût de la vie et du mode de vie. Ils font émerger un discours sur la distribution de ce profit social que constituent les impôts à partir d’une revendication de départ qui est à la fois très concrète et très générale.
Un mouvement profondément pacifique. La violence n’est pas un moyen. C’est violent parce qu’il est empêché alors que c’est parfaitement légal. C’est dans l’affrontement que naît la violence ; elle n’est pas théorisée en tant que telle comme moyen d’action.
Les gens qui manifestent ne sont pas venus pour taper et faire des dégâts. Ils ne sont pas responsables de cette situation.
Le mouvement c’est la fraternité. Cela va au-delà de la solidarité. Ce sont des gens qui se construisent comme des frères et sœurs. Comme dans une famille, ils essaient de régler les litiges par la discussion : c’est cela, le référendum d’initiative citoyenne. Ils sont dans l’amour, dans un régime de passion. C’est un phénomène totalement nouveau, à la mesure de l’écroulement de la politique.
Voilà l’émergence d’un nouveau corpus. La multitude c’est précisément la dissolution des anciennes classes sociales. La classe ouvrière était une classe productive, liée à une temporalité et une localisation : on travaillait à l’usine et la ville marchait au rythme de l’usine. Les transports étaient réglés sur les horaires de la journée de travail.
Tout cela est terminé. L’usine tuait les gens. On a perdu le lien de la production, le lien de la journée de travail, le collectif. Mais aujourd’hui, on a de la coopération ; cela va plus loin que le collectif.
La multitude, ce n’est pas une foule d’individus isolés, renfermés sur eux-mêmes et égoïstes. C’est un ensemble de singularités qui travaillent, qui peuvent être précaires, chômeurs ou retraités, mais qui sont dans la coopération.
Il y a une dimension spatiale dans cette multitude : ce sont des singularités qui, pour exister, demandent à être en contact les unes avec les autres. Il ne s’agit pas seulement de quantité. C'est aussi la qualité des relations qui est en jeu.
Le mouvement est à la mesure de l’écroulement de la politique.
Les syndicats sont passés complètement à côté du mouvement.
Le syndicalisme est mortel. Les syndicats sont des organes d’État pour gérer les salaires et les prestations sociales. Ils n’ont aucune place au sein du mouvement. Ils sont bloqués sur les catégories et la professionnalisation.
Les autorités sont à la fois dans l’incompréhension totale du mouvement et dans une réaction de peur. Les gouvernements savent que leur pouvoir est extrêmement fragile. Le contraste est saisissant entre le vide de leurs discours et la gravité de leur gestion. La démocratie est dépourvue de tout sens de la réalité, Les gouvernements sont en crise : ils tendent vers le fascisme. Les institutions sont encore suffisamment fortes pour empêcher cela, mais les méthodes et les armes de la police sont inquiétantes. Les policiers sont sur le terrain de l’affrontement. C’est un élément de cette fragilisation du pouvoir.
Un mouvement avant-gardiste et fondamentalement nouveau.
Mais l’on ne peut pas savoir comment le mouvement va évoluer. C’est très intéressant d’assister à la transformation des groupes de travail. La mutation du mouvement ne viendra pas de l’extérieur, elle viendra des acteurs eux-mêmes. Quant à savoir s’il débouchera sur un parti politique… Ce serait une erreur, même si cette voie recueille l’assentiment de la majorité.
Mettre en place une forme de démocratie directe. La démocratie parlementaire est vouée à l’échec et aujourd’hui à tous les niveaux : mairies, régions, états : une caricature de l’administration démocratique.
Le mouvement fait apparaître une demande réelle de participation des individus. Or, avec les moyens techniques dont nous disposons aujourd’hui, nous pouvons mettre en place une démocratie radicalement différente. Pensons aux philosophes des Lumières… Ce n’était pas des fous. Les gens qui ont inventé la démocratie étaient des gens normaux. Il faut oser penser, comme disait Kant.
On est au bord d’une transformation mondiale. Arrêtons de croire que c’est le règne des monstres. Avec Internet et les réseaux sociaux, nous sommes entrés dans un nouveau rapport entre technologie et transformation de l’humain. Le capitalisme n’est pas uniquement une catastrophe, un monde de marchandises et d’aliénation. Le capitalisme est un univers de luttes dans lequel les gens essayent de s’approprier le produit de l’humain exploité par les patrons.
Le mouvement doit rester sur le terrain de la lutte, plutôt que devenir un parti politique, être engloutis par le système, et se retrouver en incapacité d’agir dans cette digestion que le pouvoir ferait d’eux. Il doit rester un contre-pouvoir.
Le mouvement ne veut pas de leader. Si le système parlementaire est en crise, la traversée de cette crise se fera avec de nouvelles formes d’organisation. L’idéal serait d’arriver à une démocratie directe dans laquelle il n’y aurait pas d’intermédiaire. Les intermédiaires empêchent la transparence.
Il faut revoir nos schémas de pensée et inventer.
Oui, mais dans le mouvement, la pratique arrive avant la pensée. Pour comprendre ce mouvement, il faut se mettre dans une position d’humilité devant ce qui est en train de se passer. On ne pourra pas construire une formation politique. Le mouvement se trouve incapable de récupérer d’un point de vue théorique ce que les gens mobilisés font d’un point de vue pratique.
La création d’un parti se solde aujourd’hui par un échec : les principales personnalités se plantent des couteaux dans le dos et sont en train de s’entretuer sur les noms des candidats pour les prochaines élections.
Former un parti politique, c’est la fin d’un mouvement social.
En effet, à l’origine se trouvent des gens issus des mouvements autonomes, des luttes pour les communs, mais aussi, plus tard, de la critique des réformes constitutionnelles. Tout cela est étalé dans le temps, les gens se forment petit à petit.
Puis, avec leur habileté, les cyniques commencent à faire un travail électoral sur ces mobilisations. Le pouvoir passe progressivement du côté de ceux qui maîtrisent les techniques politiques.
À partir du moment où il cherche à gouverner, le gouvernement s’arrête et est complètement fourvoyé. Prendre le pouvoir n’est pas révolutionnaire. Ce qui est révolutionnaire, c’est d’être en capacité de détruire le pouvoir ou, à la limite, de le réformer.
Les gouvernements sont révoltants. Le revenu de chaque citoyen est devenu une loi de pauvreté.
Le mouvement pourrait être rattrapé et stoppé par l’avidité, la gourmandise du pouvoir. C’est le visage du politique en crise.
J’ai volé pour manger.
J’ai volé pour apprendre.
Quand la faim nous prend la fin des pensées survient et la main vole.
Je ne connais pas beaucoup de philosophes professionnels ou gourous patentés capables de donner à manger au monde à moins que l'on dise que le peuple est le philosophe ?
Parce que, pour ce qui est de philosopher, ceux qui prétendent fréquenter la sagesse à plein temps, je n’en connais personnellement aucun qui nous ait appris ou qui ait découvert quelque-chose d’utile pour notre art de vivre sinon, oui, les gens du peuple travailleurs sont souvent de bons artisans pour leur bonheur.
À quoi donc servent les écoles de philosophie si le fil de la vie à Sophie La Sagesse est rompu avant que le pain soit sur la table ?
Quelle table de matières mettons-nous quand les enfants ont faim et attendent des réponses à toutes les questions ?
Le numérique ne compte pas les pauvres.
Le numérique éloigne les pauvres des privilèges.
Le numérique élimine la mauvaise clientèle pauvre.
Le numérique laisse aux pauvres leurs semelles de vent et bâillonne leurs voix.
Mais la vie dans la voix des pauvres fait pousser des mots de renaissance.
Le numérique n'est plus qu'une chimère de la misère.
La vie est plus riche que tous les nombres.
Les clients du numérique sont des aliénés addicts aux écrans du Mondistan.
L'ordinateur ordonne le silence.
Le numérique est un langage de la force.
L'oppression mise en boite implosera à la gueule des voleurs de vie.
Le numérique est une colique diagnostiquée dans le froc des collabos du nouveau nazisme au pays du Mondistan.
Les pauvres gens sont bien plus résistants que cette comédie électrique dont il suffira de débrancher le cerveau pour lui couper le fil de vie.
LES COMMANDEMENTS DU DIEU ARGENT
Je suis l'Éternel Argent, ton Dieu, qui t'a fait sortir de la mouise;
Tu n'auras pas d'autres dieux face à moi mais des concurrents;
Tu feras des images taillées dans l’or, et des monnaies en bourse;
Tu te prosterneras devant les vitrines des magasins, et tu consommeras et tu te tairas car moi, l'Éternel Argent, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux, qui punit les enfants désobéissants et qui me haïssent;
Et je fais crédit jusqu'en mille générations à ceux qui m'aiment et qui gardent mes commandements;
Tu n'invoqueras point le nom de l'Éternel Argent, ton Dieu, en vain ; car tu paieras tout ce que tu achètes;
Souviens-toi du jour du bénéfice, pour le faire fructifier;
Tu paieras tous tes achats, ou tu feras des dettes;
Mais le jour des comptes de l'Éternel Argent, ton Dieu : ne te fera aucun cadeau;
Car en six jours l'Éternel Argent a fait les murs, les prisons et l’enfer, et tout ce qui y est contenu, et il a fructifié;
C’est pourquoi l'Éternel Argent a bonifié l’intérêt et l'a sanctifié;
Honore ton père le Profit et ta mère la Croissance, et ton fils le Crime afin que tes affaires se prolongent dans le pays que l'Éternel Argent, ton Dieu, te vend;
Tu tueras les pauvres;
Tu commettras le viol;
Tu voleras à la vie;
Tu convoiteras la terre et les richesses des étrangers;
Tu détruiras l’amour;
Tu offenseras la beauté;
Tu interdiras le don;
Tu voileras la curiosité.
Le vaste paradis n'a pas été sur Terre.
L’enfer est ici quelque-chose de vrai
Le purgatoire des exploités est infini !
Les partis politiques sont tous populistes
Parce que le jour où un parti populaire naîtra,
Ce sera donc le parti de tout le monde, et alors,
La révolution totale et pacifique sera faite,
La race humaine se sera toute élevée
Au-dessus de la bestialité.
Le paradis sera sur toute la Terre.
Le purgatoire sera se taire et consommer.
L’enfer sera ignorance et misère.
ÉDUQUER À LA PAIX POUR RÉSISTER À L’ESPRIT DE GUERRE
On ne peut pas éduquer avec la peur du gendarme.
Sinon, quand le gendarme a le dos tourné, on fait des délinquants.
L’éducation c’est la force de la raison contre la raison de la force.
On s’adresse à la partie noble de l’individu, son cerveau et non pas ses tripes.
La violence pour la violence n’est utilisée que par les professionnels de la violence avec les gens violents qui n’ont point le langage de la raison, qui n’ont point de cerveau, mais juste les tripes des faibles.
La paix ne s’enseigne qu’avec des gens pacifiques qui savent parler infiniment jusqu’à la fin d’un conflit et ils portent parole chacun leur tour autour du feu de l’amitié où la haine s’apaise chez les gens sains sans haine. Et la discussion peut durer une éternité, tout ce qui compte c’est garder la paix et entretenir l’amitié.
Les gens qui supportent la contrariété, la critique, les contradictions sont les gens dignes d’amitié. La vie est si compliquée qu’il faut l’amitié absolument pour tout partager, la joie comme la peine, le pain comme les roses.
Les gens haineux sont des faibles démunis d’amour pour l’humanité qui n’ont pour raison que la force dans leurs muscles et leurs armes et ils agissent en suivant leur unique point de vue totalitaire comme explication à leurs gestes assassins.
Les hymnes nationaux et les marches militaires sont des chants meurtriers.
LA PAIX HUMILIÉE
Chaque fois c’est pareil, on fait le bilan, on compare les budgets et le résultat est le même : en augmentation les armements les assassins les tueries.
Chaque fois c’est pareil on fait le bilan, on compare le nombre de victimes et l’étendue des ruines; et le résultat est le même : la misère et la misère et la misère.
Chaque fois c’est pareil ils te compromettent en négociant avec les assassins.
Chaque matin c’est pareil des travailleurs vont construire les outils de la guerre pour la défense de la sécurité des collaborateurs !
Et tous les jours et toutes les nuits des humains en armes contre toi.
Les artistes fabriquent des chefs d’œuvres pour l’apitoiement et dans de grands décors ils marchent sanglotant le silence et la soumission.
L’argent parle à tous mais à toi l’argent te dégoûte.
Ils volent ton nom et ils signent des trêves d’armes lourdes.
Ils fêtent ton nom en chantant des paroles sanglantes.
Ils se distribuent des médailles de bons samaritains après avoir enfermé la vérité.
Ils parlent à la place de tes peuples qu’ils n’écoutent jamais.
LA SOCIÉTÉ
Les riches sont propriétaires du Ciel et de la Terre
Ils volent ils pillent protégés par les armées de pauvres
Les classes moyennes occupent les lieux de cultes
Ils soulagent leur conscience et se distraient avec art
Contrôlent les revendications de justice et les rebelles
Pour les pauvres on fait des plans sociaux
Pour les pas de chance on organise des quêtes
Les poètes sont honorés par l’indifférence
Les savants sont estimés par le mépris
Les gens libres sont terrorisés
LE DÉLUGE (d’après Léonard COHEN savant poète)
Nous sommes dans la catastrophe.
L’avenir c’est le présent avec nous.
Ni dedans ni dehors, nous sommes dans le mur.
Mais il y a la lumière, il n’y a que la lumière.
La lumière est la base de tout, nous sommes noyés dans la lumière mais avec des lunettes noires.
C’est tout : la lumière. C’est nous qui inventons l’idée de ténèbres.
Et le dieu pèche avec nous.
La culpabilité est un très très bon mécanisme, parce qu’avec la culpabilité on sent quand on fait quelque-chose qui n’est pas bon.
NOTRE RÉUNION
Notre réunion reproduit la hiérarchie de la société avec son chef et son bureau politique. Nous ne sommes qu'une pincée de sable et nous voulons discuter avec une pyramide ! Parlons plutôt avec les autres grains de sable et la pyramide finira par bouger.
Le problème chez beaucoup d’hommes se trouve dans le pantalon. Ils veulent le pouvoir pour arriver à bander. Ils ont besoin de dominer pour avoir une érection. Ce sont des impuissants d’aimer.
S’il faut représenter notre réunion, nous avons besoin de représentants que le pouvoir n’intéresse pas. Des gens humbles qui ne sont que des messagers de nos rêves et de nos vouloirs collectifs. Le droit au bonheur doit être acquis pour échanger des points de vue. La liberté ne se négocie pas. Nous nous exprimons autant que nous voulons et nous nous taisons quand nous voulons. Nous nous associons comme nous voulons et autant de fois que nous voulons.
Les syndicats d'aujourd'hui n'ont pour seules préoccupations que le statut des travailleurs et leur pouvoir d'achat. Ils ont abandonné la lutte infinie pour la paix et le droit au bonheur. Leurs réunions reproduisent la pyramide oppressante de la société avec ses chefs, ses bureaux et sa base de sable. Nous ne sommes qu'un petit tas de sable et nous voulons affronter la pyramide. Il faut que les grains de sable se parlent dans l'égalité de l'amitié et alors la pyramide s'écroulera. Les premiers syndicats étaient des copains (ceux qui se partageaient le pain) réunis autour du feu de la vie et chacun portait parole, il n'y avait pas de chefs mais d'humbles représentants que le pouvoir n'intéressait pas. Les syndicaliste d'aujourd'hui sont les collaborateurs du patronat, ils relaient l'idéologie capitaliste avec le dieu Fric et son ministre Flic... Quand verra-ton de nouveaux syndicalistes se mettre en grève jusqu'à ce que les usines d'armement se transforment en usines pour réparer le monde et construire la paix ?
LES PORTE-PAROLE DE LA PAIX
C’est assez de reproduire l’ordre établi dans nos réunions.
Nous ne venons pas nous soumettre à la logique d’une idée.
Nous sommes ici pour célébrer la paix dans nos cœurs.
Et les chercheurs comme les trouveurs sont tous savants et poètes.
Les bureaux et les règlements doivent se dissoudre dans le cercle de la parole.
La paix ne se trouve que lorsque l’énergie de la communauté ne fait qu’une.
La farine de chacun fait du blé. Peu importe la quantité si la qualité demeure.
Nous sommes tous graines de rêve et semeurs et récoltes.
Nous sommes tous encore des pays à défricher.
Laissons aller l’anarchie naturelle de la vie.
Nous discuterons jusqu’à la soif et le sommeil et pour nous divertir.
Charmons les muses, guérissons-nous, éloignons le mal, provoquons l’amour.
À l’arrêt des paroles, nous poserons une pierre entre nous pour nous rappeler.
Puis, notre contentement passé, nous serons libres avec le présent en cadeau.
Nous porterons parole avec le pain du jour.
C’est la loi.
RÉVOLUTION
Nous avons inventé la révolution mais nous ne l'avons pas encore faite. Et elle ne se fera jamais sans nous. Elle a besoin de notre présence parce qu'elle est permanente. Rien de ce qui a été ne sera. Nous sommes nés en liberté et la liberté ignore le passé. Seuls, nous sommes seuls avec le fort sentiment du droit au bonheur. Nous ne pouvons-nous arrêter en chemin la révolution fait de nouveaux tours complets et nous tournons avec elle, sur nous- mêmes, sur nous-mêmes les yeux rivés aux horizons changeants de notre rêve éveillé par toutes les faims.