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Le blog de Pierre Montmory

HUMAINE DESTINÉE

HUMAINE DESTINÉE

                HUMAINE DESTINÉE

 

 

Nous serons plus nombreux que les roses sauvages

Chargées d’épines durcies au feu des étés

Nous serons l’aubépine surprenant les bergers

Tandis que le noir du ciel entasse les orages

 

Nous serons plus nombreux que les nuages

Poussés par les vents qui transportent nos messages

Nous chanterons dans nos têtes aux murs du silence

Les litanies muettes qui ont mérité les potences

 

Nous serons gorge sèche dans les sillons du sable

Pour semer graines de colère et larmes de sang

Et nos jeunesses en lambeaux se traînant

Balanceront leurs rires rouillés à l’ineffable

 

Terre rendue à l’acier plombant les murs

Nous ne pouvons plus même un murmure

Et la force des lâches nous oppresse

Nous n’avons que la vie pour seule maîtresse

 

Alors en un bouquet fraternel nous nous offrons

Pour vaincre l’injuste sort fait à Cupidon

Pour réparer l’offense à la beauté de Ninon

Nous marchons solitaires sous le même nom

 

Nous sommes la somme de nos chemins humains

Plus nombreux que les roses et autant que les fleurs

À veiller pour le lendemain, vaillants de cœur,

À battre le blé des récoltes de nos deux mains

 

Nous serons plus nombreux que les roses sauvages

Chargées d’épines durcies au feu des étés

Nous serons l’aubépine surprenant les bergers

Tandis que le noir du ciel entasse les orages

 

 

 

 

JOUR SAIN

 

Les ruines de l'oppression dans lesquelles

Les anges s'incarnent en humains presque des îles

Sur la terre entre les pierres et les sources d’eau

Qui inspirent à nouveau le vent libre et l’oiseau

Pour que les enfants jouent à la destinée

Comme sous la voûte du ciel les étoiles d’argile

Pétries dans les mains qui mangent le pain du jour

Quand les nuits enchantent telles les muses d’un

                                                                           poète

Qui avec ses fidèles compagnons partage sa quête

Et le Soleil jamais ne s’éteint ni la faim

De connaître l’autre amante sous la Lune

Sans témoin que le refrain pénible des hunes

Quand les navires virent sur des terres d’écueils

Et que les marins brisent leur quille sur les quais

Et que les filles à l’abandon les délivrent

De leurs secrets pardons déchirants leur cœur

Comme sur les lèvres bues d’une douceur

Que les mères les rappellent au grand soir

Des pères partis sur le front des bâtisses

Les ruines de l’oppression dans lesquelles

Les visages pieux couverts de cendres

Lavent à l’eau pure les souillures bénies

Et que le vent libre continue ses chemins

Jusqu’au dernier souffle des humains

Rassasié de sort commun et de chance

D’échapper aux sermons et à la potence

 

 

 

SONNENT LES MATINS                 

 

Cheval noir pétri de l’argile de la nuit

Vagabonde dans les prairies qui abondent

Dans ce beau paradis sans propriétaire

Quand le temps gris n’entasse pas les pierres

Et que l’écume blanche de sa crinière

Vole à la crête des vagues de la mer

Un peu de sel pour pimenter sa danse

Quand il entend le galop de son aimée

Ses sabots rebondissent en pas feutrés

Dans les fleurs tendres du printemps amoureux

Réveille ma mémoire assoupie dans les ruines

Où je lézarde au Soleil,  le jour trop blanc

Pour dresser la bête, sauvage comme moi,

Paresseux s’abreuvant à l’ombre des feuillages

Et grignotant tous les fruits mûrs évanescents

Ce cheval va où il va,  je vis si je peux

Sans galop rapide mais cheveux libres au vent

J’épouse la bonne fille de vie en marchant

Les muses jalouses marchent devant riant

Je lâche ma pomme croque dans leurs chairs

Elles me mordent la bouche je les laisse faire

Je pense au cheval et mon cœur galope

Cheval noir pétrit de l’argile de la nuit

Vagabonde dans les prairies qui abondent

Dans ce beau paradis sans propriétaire

Quand le temps gris n’entasse pas les pierres

 

 

 

INCONSOLABLE RAISON

 

Sur cette pierre je bâtirai une cabane

Pour les amis que je n’ai pas mérités

Comme mes ennemis qui me poussent sur les routes

Et que je dois convoyer pour chasser le doute

De leurs têtes ensorcelées par la haine facile

Je trahis les miens et promets à mes ennemis

Pour un peu de pain et de paix pour une nuit

Cette arche de bois gravée de mots par le feu

De la joie mystérieuse mise en déroute

Par les gestes fautifs d’idiots reconnaissants

Les maîtres des forges ont frappé sur l’enclume

Le rythme lancinant des miracles et des infortunes

Et le fer a battu la pierre injuste lancée au hasard

Pour prier des fantômes aux yeux effrayants

Qui font plier les genoux aux cœurs défaillants

La pierre a fait le chemin jusqu’à la cible

Et Goliath s’est écroulé comme une ruine

La maison du berger s’est dressée en croix

Les suppliciés ont réclamé de l’eau

Les soldats ont rejoint leurs mères

J’ai frotté mes mains avec de la terre

Au pied du grand mur jusqu’au ciel

Mes larmes étaient la rosée du matin

Quand l’ombre profonde quittait le désert

Et que les pierres roulaient leur sable

Mon sang rougissait comme le Levant

Les mouettes indolores ne saluaient plus l’Orient

Parce que je déchirais les restes de mes haillons

Sur cette pierre où je bâtirai une cabane

Pour les amis que je n’ai pas mérités

 

 

 

DERNIÈRE SOLITUDE

 

Dernière solitude sans qu’il soit possible

De lui donner un nom à elle étranger

Un nom qui soit un catégorique néant

Face à face avec le nouveau monde renié

Une blessure ouverte dans le cœur naïf

D’un ancien natif des dernières dates héroïques

Du troupeau humain migrateur hasardeux

Entre les miradors fuyant les chiens polices

Civils délateurs des intelligences fines

Pour muscler le bras des malins virtuoses

Et les performeurs travailleurs zélés

Des machines à broyer les marges inutiles

Au bénéfice des avares de la parole

Uniques mouvements de troupe armée

Des meutes de la terreur nette assassine

Pendant les guerres intestines coliques

L’expulsion des manques à gagner

De la plus-value des intelligences vides

Pour accumuler le sang des lingots pleins

Dans les poches des actionnaires avides

Du vide de l’atmosphère des soumis affamés

De chairs putrides de la misère organisée

Des fonctionnaires corrompus serviles bien notés

Par les patrons modèles à copier-coller

Pour des morts conformes à la réalité

Au viol de l’entendement à la rapine

Virile société ouverte sur Auschwitz

Le poteau des fusillés porte le drapeau

 

 

 

DÉRIVE ININTERROMPUE

 

Il arrache sa langue pour ne plus se taire

Dans les hauts fonds des cités de la Terre

Il enferme sa voix aux confins du silence      

Pour sentir monter en lui le sang du sens

Il ruse avec ses muses espiègles

Gueuses affriolantes déjouant les règles

Le monde emmuré devenu muet s’éloigne

Et s’éteignent les bruits des foires d’empoigne

Il noue les liens de l’oubli autour des vices

Pour un génie de sable il n’est que novice

Et il jette loin son boulet dans les bas-fonds

Les remous de la foule l’inspireront

Le jour du départ chaque heure est fatidique

Pour éloigner sa barque de la rive maudite

Combien de jours avant une terre d’écueil

Pour composer en solitaire son chant d’accueil

Que les muses accompagneront de leurs douces voix

Ce marin de l’Univers cabotant sans lois

Parle le cœur à la bouche une langue neuve

Exilé de la Corne d’Or à Terre-Neuve

 

 

 

SORTI DE LA MER

 

Sorti de la mer il échoue sur le gravier

D’une terre où son écueil se disperse

En morceaux de son être comme des îles sœurs

Il se ramasse comme le reflux contre les rochers

Comme le flux pour marcher le monde en

                                                                     chantier

Quand le pied des humains façonne rêve

Et chemins ouverts sur l’aventure des esprits

Sorti de la mer tel le magicien surpris

Par l’invention qui lui survivra au glaive

Des miettes de pains dispersées dans le vivier

À d’improbables mouettes de s’approcher

Pour un vol reconnaissant le piège de la peur

De retourner dans le néant des averses

Tandis qu’il culbute sur des masques entiers

 

Les roches muettes bavardent sous les traits

Du ciseau expressif d’un poète discret

Qui a taillé les portraits de forts caractères

Dont les épopées sont rendues à la terre

Ou bien leur histoire s’ingénie dans les

                                                                      parages

Tandis qu’il essaie d’en déchiffrer les adages

Le vent l’enveloppe comme un habit de soie

Et le bruit des vagues vous ramène à soi

La musique du présent éternel dans le chœur

De l’horizon s’approche comme un acteur

Et joue sur une scène le sable coulant des mains

La sérénade des nuits jusqu’à l’adieu des

                                                                       matins

Aux amants perdus les jours brûlants leur

                                                                         fièvre

À l’ombre de l’encre versée des poèmes

                                                                 d’orfèvres

                                     

Sorti de la pierre le masque défie le temps

Malgré ses entailles il se moque des vents

Et toutes les eaux et la terre sur sa tête

Ne pourront ignorer l’arrogance muette

De ces solides soldats paisibles insurgés

Qui ne connaissent que les vents et les marées

Les étoiles les suivent comme des filles

                                                                   charmées

Et le capitaine poète leur chante des mélopées

Seuls, les solitaires écueils s’écartent

Pour leur délivrer bon chemin pour leur

                                                                       barque

Tandis que les dieux en colère frappent le vide

Le ciel laisse gueuler le tonnerre stupide

Après quoi la pluie après elle le beau temps

Les marins gagnent la quille les filles vont

                                                                    chantant

 

 

 

ÉCHOUAGE

 

Qui chante la paix, la muse musicienne,

Aborde les rives sur les ailes du vent

Et ceux qui attendent toujours qu’on vienne

Happent dans leur filet la lumière des passants

Et envoient à ces musiciens quelques saluts

Lumières captées par des sirènes curieuses

Qui voient venir à elles des mondes inconnus

Des esquifs branlants ou des proues sérieuses

Frôlent leurs côtes sensibles au courant

Et débarquent avec leur viatique encombrant

Les muses aimables les guident quand même

D’affreux génies les traquent comme des

                                                                     baleines

Alors ils déboulent sur les quais de partout

Les caboulots les invitent à boire avec tous

Des liqueurs fortes qui calment même les fous

Quand les délateurs courent à leurs trousses

Papiers tampons profilent des ombres

                                                                   suspectes

Sitôt qu’un quidam zélé les inspecte

Ils tremblent un peu sur leurs jambes maigres

Ces innocents qui ne sont pas de la pègre

Mais qui de leurs galères ont gardé mauvais air

Parce que les flots sont trop lâches et amers

 

 

 

ÉCHOUEMENT

 

Première heure de la nuit il tourne lui-même

Dans les ressacs du sol cherchant le fond du lit

De l’océan il remonte à la surface sèche

Se cramponnant aux nœuds de la dèche

Il espère la corde solide, un répit

Pour somnoler entre deux heures blêmes

 

Pour ses rêves cruels qui le malmènent

Les cris voyous le taraudent sans merci

Comme si les incendies allumaient les mèches

Les rancunes sucrées que les flammes lèchent

La peau du supplicié déchirée sans délit

La voix des ordres ordonne qu’on l’emmène

 

Le voici haletant dans la cage barbelée

D’ombres rugueuses et d’haleines puantes

Roulant dans la boue des miradors

Les foules de ceux-là qui n’ont pour tort

Que d’avoir le regard et l’allure fuyante

Échappés des murs et jamais rappelés

 

La deuxième heure supplice des damnées

Quand le poing ganté relève son masque

Ses yeux blanchis éclairent la peur du maton

Qui prend son élan pour appliquer la question

Et qui pour réponse laisse tomber le corps

                                                                       flasque

D’un coup de crayon raye l’âme mal née

 

Il est de tous les sortilèges contre tous

Qui laissent courir le vent des rues policées

Par le doux sommeil des justes consciences

Dans la conformité des forts en sciences

Qui ajustent leurs regards au front plissé

Des palais vieillissants par les rudes frousses

 

De tous les convois des sans noms et n’avoir pas

Échoués et non promis aux langues de bois

Qui renaissent de leurs cendres comme le feu

Qui couve sa revanche sous les graves ruines

Marmonne des prières de pierres chagrines

Les jours reviennent et chassent les ténébreux

 

L’AUBE

 

Tiré de son cauchemar par les rires d’enfants

                                                                          gâtés

Le vie se moque des boniments, donne son

                                                                      présent

Comme un cadeau il reçoit l’invite à la

                                                               promenade

Et alors il s’aperçoit qu’il marche dans la clarté

Et que son cœur tremble d’un doux sentiment

Il se prend à fredonner au vent une aubade

 

Des moineaux endimanchés piaffent en fête

Il s’assoit sur un banc comme la beauté

                                                                  innocente

Son corps déguenillé offre son visage

Les passants étonnés reconnaissent le sage

Qui ne fait rien de toutes les heures toquantes

Et qui donne aux oiseaux le pain de sa quête

 

Après le juste matin et l’heure du turbin

L’homme du banc se lève, secoue son chapeau

Il emprunte le boulevard pour le remonter

À l’heure de l’apéro il rejoint ses poteaux

Qui font à cheval le paris des paris urbains

Il s’approche d’eux et continue à raconter

 

Ce que dit cet homme il faut le suivre en

                                                                      marche

Car il n’est pas omnibus et saute des points

Il s’arrête pour toiser de près son prochain

Il voit les yeux devine le cœur avise l’arche

Et si le sbire lui plaît et lui cause s’il vous plaît

Monsieur voyez-vous le monde est en marche

 

 

 

MIDI

 

Ah, midi, c’est l’heure des titis qui vont becter

Pendant la pause des employés il va quêtant

Leur offrir des bonjours et tout son boniment

En ouvrant les portes et saluant du chapeau

Ces belles dames ses beaux messieurs en

                                                                       paletot

Cèdent la dime du dépit la lèvre humectée

 

Quand c’est l’heure la fourmilière repart

Dans l’autre sens finir la journée à l’envers

De l’endroit où l’homme sage n’est guère

Que pour s’absenter dans des rêveries de

                                                                        départ

Et quand tout le monde du travail est en congé

Il est seul à arpenter le pavé, oyez !

              

               SOIR

Le soir est un autre jour avec d’autres soleils

Car la nuit les êtres ne sont pas pareils

Ils promènent leurs ombres comme le feu follet

Des néons stridents et des phares perdus

Ils montent des manèges avec des farfadets

Et espèrent trouver là la vérité toute nue

 

Sage qui fait sa manche pour coudre son festin

Car avant l’aube on le pourchasse dehors

Et le café crème et les croissants valent de l’or

Et comme il ne veut se priver de rien

Il joue la comédie aux portes des châteaux

Et parfois il finit sa chanson au violon

 

 

NUIT

 

Son salut il le doit à quelques âmes charitables

Qui trouvent sa déconvenue pardonnable

Et de port en port, sur la corde raide,

Il sommeille comme un juste qui plaide

Au tribunal des étoiles les jurés sont des

                                                                       cloches

Qui sonnent la charge aux pions des bastoches

 

Pierre Marcel Montmory – trouveur

sculpture de Humberto Abad      

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P
LA POÉSIE SE MEURT<br /> Mon cher poète,<br /> Pour ce qui est de la versification de mes derniers poèmes, je dois te dire que je découvre qu'aujourd'hui, après la trique métrique des classiques et les grandes orgues de Hugo - et jusqu'au vers libre de s'envoyer en l'air de Prévert, nous avons appris à parler autrement, et alors je reviens à l’alexandrin avec un autre souffle, les pieds n'ont pas la même plasticité sur le goudron ou le béton et l'on parle plus savamment qu'avant, en marchant, mais aussi plus approximatif en courant sur le temps qui s'entasse comme feuilles mortes, le temps, le rythme, à qui on ne donne plus le temps de pourrir, ni aux graines d'avoir mûri, ni aux printemps de fleurir, que déjà l'on mange des prévisions capitales qui amenuisent la provision des récoltes et c'est pourquoi je t'avertis, que les poètes d'aujourd'hui se suicident avant d'avoir écrit leur premier vers, comme si à peine sorti de la mer l'on cherchait déjà la sortie, l'éloignement fugace du créateur - honni soit-il, avec la patience qui était une science au temps où les sages prenaient le temps de s’asseoir avant que d'égrainer leurs chapelets de contes, oui, monsieur l'écrivain, demain n'aura plus deux mains, mais qu'un seul doigt dressé pour pianoter des onomatopées, et nous aurons des machines poétiques numérisées à l'usine des idioties, les langues engourdies ne prononceront que quelques codes qui formeront des hiéroglyphes d'une pyramide à l'envers du ciel depuis que l'enfer tombe ici entre les mausolées et les banques du silence cadenassé, et tout cela construit par des travailleurs qualifiés, avec les plans d'ingénieurs de talent, l'administration de fonctionnaires zélés, tous commandés par les banquiers qui, par le passé nous ont montré comment crucifier l'amour et exterminer la beauté. Les vers retourneront à leur premier ministère, au champ inquisiteur des cimetières, la poésie se meurt… J’espère bien t’avoir fait pleurer pour que tes larmes adoucissent l’amère douleur de nos pieds nus sur le sable brûlant de notre exode.<br /> <br /> Pierre Marcel Montmory - trouveur
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C
La destinée est liée à la mer, la terre, les éléments dont nous sommes partie prenante, nos atomes se mélange à la nature.<br /> @mitié
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